Histoire de l'OELM

Si l'OELM m'était contée...

Voici l'histoire de l'OELM racontée par Gaston Ducos, membre fondateur et ancien trésorier de l'OELM. Cette narration date de mars 2003.

«

Vous voici à l'OELM, centre Henri Barrio, à Aragnouet. C'est certainement un ami qui l'apprécie de longue date qui vous a suggéré de vous inscrire à l'un de nos séjours. Comme la plupart des nouveaux venus, vous ne le regretterez certainement pas et vous reviendrez souvent parmi nous.

Mais qui était Henri Barrio ? Qu'est-ce que l'OELM ? En quelles circonstances a-t-elle été créée et dans quel but ? Comment Aragnouet ? C'est une longue histoire que je vais tenter de vous faire découvrir ; une histoire exemplaire à bien des égards et qui a marqué très profondément la vie de ceux qui l'ont vécue. Elle mérite d'être connue car elle explique l'état d'esprit qui règne chez nous : l'état d'esprit OELM, tant apprécié de tous nos adhérents, jeunes ou moins jeunes.

Qui était Henri Barrio ?

Vous verrez sa photo dans le grand réfectoire, juste au-dessus du bar. Le montagnard au grand béret, avec sa corde, c'est lui. Il est, alors, au sommet de son art. Ses amis l'appelaient familièrement « Coucou ». Il était instituteur et, semble-t-il, le seul à être guide de haute montagne.
C'était un meneur d'hommes, doté d'un grand charisme. Né en 1912, il fit ses études au Lycée Saint-Cricq, à Pau. C'est là que son « prof » de maths, Monsieur Aussat, mort et enterré à Aragnouet après avoir été emporté par une avalanche, lui fit découvrir la montagne.
Il devint l'un des plus grands pyrénéistes de son époque et fut le premier à ouvrir plusieurs voies dans différents massifs. Il fallait beaucoup de courage, d'audace mais aussi de ténacité, d'endurance et de persévérance au service de la compétence pour accomplir de telles prouesses. Toutes ces qualités lui permirent plus tard de vaincre des montagnes d'inertie, d'incapacité, d'indifférence mais aussi de jalousies, d'ambitions personnelles ou même d'animosité de certains adversaires politiques ou syndicaux.
Nommé instituteur dans un hameau de Sarrance, en vallée d'Aspe, il organisa bénévolement des sorties ou de petits séjours en montagne dont profitaient ses amis ou collègues. A la fin, on faisait les comptes et chacun payait son écot. C'est ainsi que commencèrent les premiers stages et que se forgea une équipe que l'on retrouvera plus tard. Ceci dura jusqu'en 1942.
De la période suivante, je ne retiendrai qu'une seule chose, qui vous permettra de mieux juger l'homme qu'il était : membre d'un groupe de Résistance, arrêté par la Gestapo, il parvint à s'évader en sautant d'un train en marche. Il alla alors se réfugier chez un de ses amis, montagnard comme lui, et personne ne le revit pendant plusieurs mois.

Après la Libération, il reprit son travail et l'organisation de sorties en montagne.

Le refuge de l'Abérouat

Alors que j'étais instituteur à Gabas, le premier stage auquel je participai eut lieu à Lescun, durant les vacances d'hiver de 1947-48. Nous étions une quarantaine et certains logeaient chez l'habitant ; c'est là que je fis sa connaissance.
Mais ces petits stages ne lui suffisaient plus ; il voyait beaucoup plus grand et beaucoup plus loin. Or, au-dessus de Lescun, il y avait un vieux refuge, appartenant à la commune, et géré avant la guerre par TCF (Touring Club de France) puis par les Auberges de Jeunesse. Il était en fort mauvais état : il avait été pillé ; plus de portes ni de fenêtres, plus d'alimentation en eau. En outre, pas de route carrossable pour y accéder. Il était à plus d'une heure de marche de Lescun.
Pendant plusieurs mois, il s'escrima pour que ce refuge soit géré par l'Education Nationale. Enfin, il obtint satisfaction. La Fédération des Oeuvres Laïques qui en avait la charge le mit à la disposition de l'oeuvre de montagne.

Coucou, qui avait carte blanche, fut alors détaché par l'Inspection d'Académie pour le remettre en état et y organiser par la suite des activités scolaires et post-scolaires. Alors, un travail colossal, qui allait durer plusieurs années et rassembler de plus en plus de jeunes et moins jeunes, commença. Durant les vacances de Pâques 1949 Coucou organisa, dans des conditions de vie spartiates, le premier stage de travail. Et pour un coup d'essai, ce fut un coup de maître. Heureusement, il fit beau temps ! Nous logions sous la tente et faisions notre toilette dans le ruisseau. Un jour, on vit arriver en gare de Lescun - Cette Eygun, à 3 heures de marche du refuge, une soixantaine de gars et de filles, instituteurs pour la plupart, armés de pics, de pelles ou de pioches. Pendant dix jours, ils allaient travailler d'arrache-pied, sur un terrain fort pentu, pour permettre le passage du Bull chargé de faire les 6 km de route utilisable par une jeep.
C'est durant ce stage que s'est formé et soudé le noyau d'une équipe qui travaillera durant plus de huit ans. Il fallait vraiment avoir la foi pour travailler aussi dur, bénévolement, et payer en outre sa pension.

Dès la rentrée de 1949, Fernand Lavigne, instituteur, sera détaché au refuge et y restera jusqu'en 1952.

Le travail de restauration du refuge avance à grands pas et peu à peu on peut accueillir les premières classes de neige ou de montagne, des colonies de vacances ou des camps d'adolescents sous la tente. En 1952, Fernand Lavigne, après 3 ans de dévouement et de dur labeur, quitte l'Abérouat. Coucou, à qui l'Inspecteur d'Académie ne refuse rien tellement il a confiance, demande et obtient deux détachements. Jean Nébout remplace Lavigne au refuge et je suis détaché à Lescun, sur son poste. Gilbert Ducos, qui à ce moment-là était titulaire en Gironde sera, toujours à la demande de Coucou, muté dans les Pyrénées-Atlantiques et détaché à l'Abérouat en 1954.

On travaillait presque sans subventions. Mais, grâce au travail bénévole d'un nombre toujours croissant de moniteurs, nous faisions des plus values très importantes qui nous permettaient de financer les travaux d'amélioration ou d'agrandissement de nos installations. Un jour, Coucou, qui avait toutes les audaces et foi en l'avenir osa acheter, aux Forges d'Abel, « l'Hôtel International », abandonné depuis quelques années, mais encore en bon état. Il comptait une vingtaine de chambres. Vous noterez qu'à ce moment-là, l'administration lui laissait prendre tous les risques.
Après l'avoir restauré on put y accueillir une colonie de 80 filles et tout l'encadrement.

Au départ, dans les projets de Coucou, cet hôtel ne devait être qu'un des maillons d'une chaîne de « Découverte du milieu naturel » allant du Pays Basque jusqu'à Gourette. A cet effet, il avait déjà contacté plusieurs personnes à Iraty, La Pierre-Saint-Martin, Peyranère et le plateau de Lhers. Il pensait également à Gabas, en vallée d'Ossau. Il avait même organisé un séjour de découverte à la mer à Saint-Jean-de-Luz. Plus tard il envisageait d'organiser, pour des groupes d'adolescents, des camps itinérants allant d'un centre à l'autre. Un projet grandiose qui ne verra jamais le jour.

A ce moment-là, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes ; nous avions de plus en plus de succès et les classes de neige, les colonies de vacances et les camps d'adolescents se multipliaient. Notre groupe, soutenu par l'Inspecteur d'Académie et l'Inspecteur de la Jeunesse et des Sports se renforçait un peu plus chaque année.
Il faut savoir que, ces années-là, notre département était devenu, grâce à notre travail, le premier en France, avant les départements alpins, pour les activités scolaires et post-scolaires de ski et de montagne.

Pourtant, c'est alors que le séisme éclata

Ce succès éveilla beaucoup de jalousies et d'ambitions personnelles ; bien des personnes voulurent alors prendre la maîtrise de cette oeuvre. Il faut préciser que, depuis le début, nous avancions sans statuts précis, dans le cadre de la « Section Montagne » de la FOL des Pyrénées-Atlantiques.
Bientôt se posa la grande question qui allait déclencher « L'affaire de l'Abérouat ». A qui allait appartenir l'hôtel des Forges d'Abel que nous venions d'acquérir ? Qui aurait l'honneur et l'avantage de présider cette oeuvre qui obtenait des résultats si beaux et si prometteurs ?

Serait-ce l'Inspecteur de la Jeunesse et des Sports qui avait détaché un moniteur de ski et de montagne, Robert Villecampe, ou l'Inspecteur d'Académie qui présidait tout à la fois, la FOL et les PEP ? Les PEP venaient de modifier spécialement leurs statuts pour pouvoir intégrer notre oeuvre.

Nous avions fait la preuve de nos capacités ; pratiquement, la majeure partie des travaux de restauration et d'agencement des locaux et le remboursement des emprunts avaient été financés par la plus value dégagée grâce au bénévolat de tout l'encadrement des camps et colonies de vacances. Au fil des ans, ceci représentait des millions et des millions de francs. Aussi, d'après nous, la seule solution équitable, aurait été de créer une association autonome, loi 1901, membre de la FOL, qui préciserait le rôle et les responsabilités de chacun.
Mais non, ces messieurs ne voulaient d'aucune entente, pas plus que le Syndicat des Instituteurs. Même la FOL, qui en aurait été la principale bénéficiaire, préférait que nous adhérions aux PEP. C'est un comble ! Pourquoi ? Tout simplement parce que la majorité des conseils d'administration des PEP et de la FOL comprenait les mêmes personnes (notamment tous les inspecteurs primaires et des délégués du SNI) et que l'administration contrôlait mieux les PEP que la FOL. En effet, rares étaient les départements où l'Inspecteur d'Académie était président de la FOL, alors qu'il est d'office président des PEP.

On voulait bien de nous pour travailler, mais le pouvoir de décision devait rester l'apanage des bien-pensants. En effet, à leurs yeux, nous avions un défaut impardonnable, un vice rédhibitoire ; Coucou et la plupart de ses amis étaient communistes ou sympathisants et militaient à la tendance minoritaire du syndicat des instituteurs (tendance « Unité et Action »).
Peu importait si les décideurs n'avaient aucun mérite, aucune compétence. Tout d'un coup nous n'étions plus que des contestataires, des trublions, des empêcheurs de tourner en rond qu'il fallait éliminer. La vague anticommuniste qui déferlait cette année-là sur la France facilita l'opération.
Et la cabale prit son essor.
Comme il est dit dans un article de presse que vous pouvez lire à Aragnouet, une lutte politico-syndicale acharnée, qui allait durer plusieurs mois, s'engagea. Nous n'étions pas résignés à nous laisser évincer sans nous battre.
Comment justifier notre éviction aux yeux de toutes les personnes, de tous nos collègues qui nous connaissaient et nous estimaient ? Ce fut simple : la médisance, la calomnie, la diffamation répandues à l'aide des bulletins syndicaux ou au cours de différentes réunions.

Les rumeurs, les messes basses foisonnaient. Tout était bon pour essayer de justifier les sanctions qui allaient suivre. Comment, disaient-ils à qui voulait l'entendre, Coucou a-t-il pu financer la réfection du refuge , celle de l'hôtel des Forges d'Abel et le remboursement des emprunts qui nous avaient été consentis lors de son achat ? D'où venait l'argent ? Mystère.

Pourtant tous nos détracteurs savaient pertinemment que, si tout notre encadrement avait été payé au tarif pratiqué dans les colonies des PEP, il nous aurait fallu, chaque année, plusieurs millions de francs. Ce sont précisément ces sommes fort importantes, économisées sur les salaires, qui avaient permis de faire face à toutes les dépenses non subventionnées. Au bout de quelques années, la plus-value était énorme.

En aucun cas, ils ne pouvaient et ne voulaient l'admettre ; toutes leurs accusations seraient tombées à l'eau. Heureusement que nous n'étions plus au Moyen-Age ! Coucou aurait été accusé de sorcellerie et condamné au bûcher.
La bataille fut si rude, qu'encore maintenant, après plus de quarante ans, quelques-uns en font de mauvais rêves. Pour vous montrer quels sommets ils atteignirent, je ne vous citerai que deux raisons qui furent mises en avant.
Un jour, un responsable éminent du SNI (certainement ignare en comptabilité mais spécialiste en médisance) osa accuser verbalement notre camarade Raymond Andia, instituteur à Saint-Jean-de-Luz, d'avoir détourné 100 000 francs. Aussitôt, une assemblée générale extraordinaire de la FOL fut spécialement convoquée, pour, pensait-on en haut lieu, définitivement nous détruire. Malheureusement pour eux, les deux experts-comptables désignés par l'Académie pour vérifier les comptes certifièrent, devant tout l'auditoire, qu'il n'y avait eu aucun détournement. Il s'agissait simplement d'un virement de fonds.
Imaginez un peu la stupéfaction, le dépit et la rage de nos accusateurs. Non seulement leur argument principal s'effondrait, mais ils venaient d'être pris, publiquement, en flagrant délit de mensonge.
Quant à moi, ils m'accusèrent, toujours verbalement, d'avoir voulu m'approprier l'hôtel des Forges d'Abel. Rien que cela !! Que s'était-il passé ?

Quand la promesse de vente avait été signée, comme je vous l'ai dit plus haut, nous n'avions pas de statuts précis. Alors, le notaire, vu l'urgence de la réponse à donner, rédigea le plus légalement du monde cette promesse de vente à mon nom.
Cette procédure permettait d'attendre, pendant quelques mois, l'issue des discussions au cours desquelles l'acquéreur serait désigné. La preuve que tout était légal, puisque, le jour venu, je n'eus qu'à donner une signature au bas de la nouvelle promesse de vente au profit de la FOL. S'il en avait été autrement, il ne fait aucun doute qu'ils nous auraient poursuivis en justice, comme le bruit en courait.

Dans un des albums de l'OELM vous trouverez un bulletin édité par nos soins et envoyé dans toutes les écoles pour répondre à toutes ces infamies. Quel beau titre ! « Des Montagnes et des Hommes ». Tous ceux qui nous connaissaient, savaient bien que ces accusations étaient infondées ; mais les autres ?

La raison du plus fort..., comme l'a si bien dit La Fontaine, finit par l'emporter.

Un nouvel Inspecteur d'Académie fut chargé de régler cette affaire. Il n'eut besoin d'aucune justification. Est-ce un hasard si, à la même époque, un nouveau Préfet fut nommé à Pau ? Il est permis d'en douter. L'ordre de nous éliminer était venu « d'en haut ».
Coucou, inébranlable, soutenu par toute son équipe, refusait de changer de ligne, d'accepter les conditions qu'on voulait lui imposer. Personne n'avait rien de valable à lui reprocher. Pour nous il n'y avait qu'un refus de soumission à un abus de pouvoir, à une décision inique que l'on voulait nous imposer.
Alors les sanctions tombèrent. En février 1957 les deux détachements furent supprimés. Gilbert fut nommé à Lonçon et Coucou à Luc-de-Béarn, dans la région de Monein, alors que sa femme était titulaire à Lescun. Avec eux, tous les bénévoles, sans exception aucune, quittèrent l'Abérouat. Toute l'équipe se retrouvera quelques mois plus tard lors du stage de Héas.

C'est ainsi que nous fûmes évincés. On nous confisqua le fruit de plusieurs années de travail au profit de la FOL des Pyrénées-Atlantiques. Imaginez ce que fut notre rancoeur, notre désespoir. Tout le monde était assommé.
Quelques semaines plus tard on vint prendre livraison du dernier matériel stocké dans un hangar proche de l'école. C'était vraiment la fin.
Les séïdes de la FOL, des PEP et du SNI étaient comblés.

Le jeudi suivant, Coucou me demanda de descendre à Pau avec lui. Pourquoi ? Je ne m'en souviens plus. Nous n'étions pas encore arrivés à mi-côte lorsqu'il me dit : « Gaston, on repart ; on recommence à zéro ». J'étais abasourdi ; après ce que nous venions de subir, je n'en croyais pas mes oreilles.
Coucou, lui, toujours aussi déterminé, ne se résignait pas, ne reculait devant rien. On lui avait arraché l'oeuvre dont il avait rêvé et qu'il avait créée, il allait recommencer.

Et c'est ainsi que commença le troisième épisode :

La création de l'OELM

On n'allait pas oublier de sitôt la leçon qui venait de nous être donnée : il fallait d'abord rédiger des statuts qui garantissent, à ceux qui travaillent, la possession de leurs réalisations. Coucou partit consulter des spécialistes et autres juristes. Il alla même jusqu'à Paris pour discuter avec la Ligue de l'Enseignement car il coulait de source que nous voulions rester dans le cadre de l'Education Nationale.

Ce sont ces statuts, déposés à la sous-préfecture de Bayonne le 28.08.1957, agréés, parfaitement légaux, qui régissent la vie de l'OELM depuis sa création et qui lui ont permis de devenir ce qu'elle est aujourd'hui.

Il ne faudra jamais l'oublier.

Six mois étaient à peine écoulés ! Déjà Coucou avait sillonné les Pyrénées à la recherche de bâtiments qui conviendraient à nos activités. Nos adversaires réussirent à empêcher notre installation dans les Pyrénées-Atlantiques ; dans un site merveilleux, à Bious Artigues, au pied du Pic du Midi d'Ossau. Avaient-ils tellement peur de nous ? Craignaient-ils de n'être pas de taille à supporter la comparaison, même avec leurs subventions et leurs détachements, alors que nous n'avions absolument plus rien ?
Notre réussite à Aragnouet et leurs difficultés aux Forges d'Abel en sont sans doute la démonstration.

A quelque chose malheur est bon, dit-on souvent. Ce fut le cas pour nous. Sous l'impulsion de Coucou, les recherches se poursuivirent.

A Noël 1957, un premier stage de ski (plus de 180 stagiaires) fut organisé à Héas dans des conditions « abracadabrantesques ». Blactot en a fait le récit et vous pouvez en voir une photo souvenir à la réception.
Un peu plus tard Coucou obtint la location, pour le franc symbolique, des bâtiments actuels appartenant à la commune d'Aragnouet. Ils étaient en fort piteux état, sans route carrossable pour y accéder. En outre, nous nous trouvions en haut de la vallée qui se terminait en cul-de-sac. Heureusement, tout ceci ne nous découragea pas car, quelques années plus tard, la station de ski de Piau-Engaly fut créée et la construction du tunnel de Bielsa nous ouvrit la route vers l'Espagne.
On ne pouvait mieux rêver.

Il fallut beaucoup de courage et d'abnégation au premier Président, Monsieur Jean Blactot, et à tous les membres du Comité Directeur, pour accepter les responsabilités énormes dues au fait que nous repartions vraiment à zéro, sans un sou en caisse.
Dire que nous repartions à zéro n'est pas la totale vérité car nous avions mieux que de l'argent : la réputation ; et, aussi paradoxal que cela puisse paraître, un grand fonds d'honnêteté.
Il nous suffisait de nous présenter à un fournisseur de la part de Coucou pour que d'importants crédits nous soient aussitôt ouverts. Malheureusement, il fallait les rembourser ! Mais, sans ces avances, nos difficultés auraient été plus difficilement surmontables. La grande hantise était, après chaque stage, de ne pouvoir payer toutes les factures ; il y avait sans cesse des travaux imprévus, indispensables et urgents à réaliser : toitures endommagées, chauffage défaillant, conduites d'eau gelées, etc... Ce fut donc très dur et même très compliqué ; mais une gestion rigoureuse vint à bout de toutes les difficultés financières.
Les conditions furent particulièrement difficiles pour les gestionnaires que furent, durant les premières années, Gilbert Ducos, Raymond Andia, Jo Harcaut, Milou et Monique Lacoste. Il en fut de même pour les directeurs des premières colonies de vacances Hélène Darrière et Jean Pardies. Aucune route carrossable n'arrivait là-haut. Pendant les vacances de la Toussaint, il fallait rentrer toutes les provisions pour les vacances d'hiver : une tonne de charbon, 300 litres de vin en fûts, 500 kg de pommes de terre et toutes les conserves. Il ne pouvait y avoir aucune livraison à domicile et chaque stage exigeait un énorme travail, beaucoup de dévouement et même de sacrifices pour tout le personnel d'encadrement et de cuisine. Un jour, lors d'un stage de Noël, toute l'équipe de cuisine, sous la conduite de Raymond Andia, arriva en haut, à pied, en chaussures de ville et dans 50 cm de neige, depuis le pont du Moudang. Et ils arrivaient de Saint-Jean-de-Luz ! Quel souvenir !!
Quant aux premiers stagiaires, il leur fallut également beaucoup de compréhension pour accepter les conditions spartiates de logement ; on ne recevait que peu de familles et pas d'enfants en bas âge. La majeure partie des stagiaires était composée d'étudiants du Lycée de Biarritz sous la conduite de leur professeur, Monsieur Ballon, ou d'étudiants venant de Bordeaux et recrutés par François Loubet et Boris Sandler. Plus de quarante ans après, quelques-uns viennent encore à l'OELM. Si vous les croisez, faites leur donc raconter leurs conditions de vie et d'hébergement et vous aurez une meilleure idée des progrès qui ont été réalisés.
Seule l'ambiance n'a pas changé ; elle a toujours été aussi bonne.

Avec le temps qui passait, l'un après l'autre, les membres fondateurs confiaient leurs responsabilités aux plus jeunes. En 1983, Gilbert Ducos succéda à Monsieur Blactot et, avec lui, tout une nouvelle équipe prit les rênes. C'est celle que vous connaissez aujourd'hui composée non seulement de ceux qui encadrent les stages mais aussi de ceux qui s'occupent du secrétariat, des inscriptions, de la comptabilité, des charges sociales, etc...
Croyez-moi, ceci représente énormément de travail et ceux qui l'assument y passent plusieurs heures par semaine durant toute l'année.
Aujourd'hui, l'OELM est propriétaire des bâtiments.

Mais que veut dire OELM, Oeuvre Educative Laïque de Montagne 

Laïque parce qu'elle a été créée par un groupe d'enseignants laïques, fiers de l'être et de l'école qu'ils représentent. Ils se font un devoir d'aller la défendre quand elle est menacée comme en témoigne un couplet ajouté au chant béarnais « Aqueros Mountagnos », que vous entendez souvent au cours des soirées.
Educative car on désirait qu'elle apporte à nos adhérents, grâce à l'étude du milieu, encore plus que la simple pratique du ski et de l'escalade ; et ce n'est pas peu. A l'origine, ce sont surtout les enfants et les adolescents qui devaient surtout bénéficier de nos activités.
Educative, c'est certain, mais également sociale. Si à l'Abérouat nous recevions les enfants du comité d'entreprise des usines Messier d'Oloron ou de Renault de Boulogne-Billancourt, nous avons reçu à Aragnouet, pendant plusieurs années, ceux du Secours Populaire et de l'Union Sociale Maritime, tous issus de milieux modestes.
Les colonies de vacances et les camps ont peu à peu disparu, faute de demande. Maintenant ce sont des classes de neige et des classes vertes que nous hébergeons.

En outre, un bâtiment à été aménagé en refuge et accueille, tout le long de l'année, petits groupes et familles.
Une chose nous caractérise : c'est la diversité des personnes que nous recevons et qui se sentent si bien à l'OELM.
En effet, qui côtoyons-nous durant nos différents séjours ?

  • Des bleus, des blancs, des rouges, des noirs et des métis,des jaunes et des verts ; tout l'arc-en-ciel.
  • Des français (Béarnais, Basques, Bretons, Poitevins, Charentais ou Landais, etc...). Bref, toute la France.
  • Des étrangers, Slovaques, Belges, Ecossais, Maghrébins, sans oublier les Allemands, qui, très vite après la fin de la guerre,ont participé aux rencontres Franco-Allemandes dirigées par Hélène et Jean Darrière.
  • Des gens de toutes professions et de toutes conditions qui s'entendent à merveille et passent, côte à côte, dans une ambiance aussi joyeuse que conviviale, de fort agréables vacances. Le réveillon de Noël et les veillées de chants en sont une très belle image et ont toujours autant de succès.

Mais il y a encore deux choses remarquables que l'on ne trouve nulle part :

  • Nos chambres n'ont pas de clé. Ceci étonne toujours ce qui viennent chez nous pour la première fois. Pourtant, on n'a jamais entendu personne se plaindre de chapardages.
  • Encore mieux: Les utilisateurs du refuge font eux-mêmes leurs factures. Avez-vous vu ça ailleurs ? C'est un bel exemple de confiance et de civilité.
Nous menons également une action sociale par les prix que nous pratiquons : des prix dégressifs pour les familles nombreuses, une location de matériel à des prix défiant toute concurrence ou la location des bâtiments et du refuge dans des conditions très avantageuses pour les classes de neige ou les classes vertes.

L'OELM, c'est tout cela et beaucoup plus encore. C'est ce qu'apprécient ceux qui viennent chez nous depuis plusieurs années et participent tout naturellement et soigneusement au nettoyage des bâtiments et du réfectoire. Certains même regrettent le temps où ils chantaient, chaque soir, en essuyant la vaisselle. Cependant, on entend parfois quelques dissonances : nos statuts ne seraient pas démocratiques.
C'est faux ! Absolument faux ! Toutes les décisions sont prises par le Comité Directeur, régulièrement élu, qui se réunit une fois par trimestre et plus souvent si nécessaire.
Alors, que nous reproche-t-on ? Simplement de ne convoquer à l'assemblée générale que les membres actifs ou stagiaires et non tous les membres adhérents à l'OELM. Ce sont nos statuts qui l'ont prévu expressément ainsi. Et pour cause. Je résume.
D'après nos statuts :

  • Toute personne qui paie sa cotisation pour participer à nos activités fait partie des membres adhérents ;
  • Ceux d'entre eux qui, pendant au moins trois ans, militent de façon continue et désintéressée, et participent à l'encadrement bénévole de séjours d'été ou d'hiver ou au stage de travail, sont admis comme membres stagiaires. La porte n'est fermée à personne. Il suffit de trouver deux parrains.
  • C'est parmi ces membres stagiaires qui ont fait la preuve de leur attachement à l'OELM que, chaque année, le Comité Directeur nomme les nouveaux membres actifs.

Quand, pour une raison quelconque, on cesse de militer, on perd le titre de membre actif ou stagiaire.

Pourquoi l'avons-nous voulu ainsi ? Non seulement par précaution (lors d'une réunion qui précédait notre éviction de l'Abérouat, un adhérent se présenta avec tellement de procurations, qu'à lui seul, il avait presque la majorité) mais aussi par respect pour tous ceux qui, par leur travail, à quelque poste que ce soit, y compris pendant le stage de travail, assurent la prospérité et l'épanouissement de l'OELM.
Comme on dit dans une chanson qui eut beaucoup de succès avant guerre :
« Avant d'être capitaine, il faut être matelot » et seuls travail et dévouement permettent de gagner des galons.

« Et si le bateau coulait ? » demandent certains pessimistes. C'est prévu. Tout serait attribué à la FSGT dont les activités civiques, sociales et sportives ont une grande affinité avec les nôtres.

Mais, pour l'instant, il n'y a aucun risque de naufrage. Au contraire...

Ce qui fait chaud au cÏur, c'est de voir tous ces jeunes qui participent à l'encadrement de tous nos séjours d'été comme d'hiver et surtout au stage de travail. Ils ont un état d'esprit, un enthousiasme, dans le droit fil de celui qu'avaient Coucou et tous ceux qui fondèrent l'Abérouat et l'OELM.

C'est le stage de travail qui est l'âme de l'OELM

C'est là que ces jeunes, sous la conduite d'adultes très qualifiés : chefs de chantiers, maçons, plâtriers, charpentiers ou menuisiers, peintres, électriciens, etc..., sans oublier les enseignants, ont réalisé tous les gros travaux. Par exemple, tout au début, sous l'impulsion et la conduite de Castagnet, la cave sous la cuisine et la réception. Et ils n'avaient que des pics, des pelles et des brouettes. Combien de brouettes de terre ? Combien de jours ? Que de volonté et d'opiniâtreté pour poursuivre jusqu'au bout. Ajoutez-y « la muraille de Chine » et, chaque année, la réfection tant extérieure qu'intérieure de tous les bâtiments. C'est un très dur labeur qui exige de chacun beaucoup de peine et d'efforts, beaucoup de courage ; mais c'est là aussi que se forgent les grandes amitiés. A la fin août, c'est la grande joie des retrouvailles. Pour de nombreux participants, c'est le stage qu'il ne faut surtout pas manquer, tant ils ont le sentiment de faire partie d'une grande et même famille. Ceci explique sûrement pourquoi, d'année en année, le nombre de participants augmente (plus de 70 inscrits au stage de 2002).
Deux chants, l'un composé par les filles, l'autre par les garçons en sont la plus belle illustration.
Connaissez-vous beaucoup d'autres associations capables de réunir autant de personnes pour travailler bénévolement ?

Ce stage est également la pépinière de l'OELM. Là se forment les futurs membres actifs qui composeront, quelques années plus tard, le Comité Directeur.

Et maintenant que vous savez, lors d'une prochaine rencontre, tout en prenant l'apéritif, vous pourrez porter un toast à l'OELM et direz en levant votre verre :

« Bravo les jeunes et leurs aînés ; longue vie à l'OELM »

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